PRéFACE
La Loi sur les conflits d'intérêts, L.C. 2006, ch. 9, art. 2 (la Loi) est entrée en vigueur le 9 juillet 2007.
Conformément à l'article 68 de la Loi, si la commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique est saisie d'une question renvoyée par le commissaire à l'intégrité du secteur public en vertu du paragraphe 24(2.1) de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles, elle doit fournir au premier ministre un rapport énonçant les faits, son analyse de la question et ses conclusions. La commissaire fournit également une copie de ce rapport au titulaire de charge publique ou à l'ancien titulaire de charge publique faisant l'objet du rapport ainsi qu'au commissaire à l'intégrité du secteur public. Enfin, le rapport est rendu public.
Le 9 octobre 2014, le commissaire à l'intégrité du secteur public m'a renvoyé une divulgation protégée que son bureau avait reçue le 14 juillet 2014. Conformément au paragraphe 24(2.1) de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles, le commissaire à l'intégrité du secteur public doit saisir la commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique de l'objet d'une telle divulgation s'il estime que l'objet porte sur une question relevant de la compétence de la commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique.
La divulgation faite auprès du commissaire à l'intégrité du secteur public a soulevé des préoccupations relativement à une présumée intervention politique d'un député, d'un ministre et d'un sous-ministre concernant l'annulation d'une pénalité pécuniaire. La pénalité avait été imposée à une société, dont le directeur résidait dans la circonscription du député.
Selon la Loi sur les conflits d'intérêts (la Loi), je suis tenue de publier un rapport public où j'expose les faits, ainsi que mon analyse et mes conclusions lorsque je reçois un renvoi du commissaire à l'intégrité du secteur public. Je dois publier un rapport même dans les cas où je décide de ne pas entreprendre une étude en vertu de la Loi.
L'individu qui a fait la divulgation auprès du commissaire à l'intégrité du secteur public a d'abord soulevé ses préoccupations dans une lettre confidentielle datée du 11 juillet 2014 qui était adressée au Commissariat, au Commissariat à l'intégrité du secteur public et à l'agent supérieur de l'intégrité d'un ministère du gouvernement du Canada. Il s'agissait du même document que m'a renvoyé le commissaire à l'intégrité du secteur public le 9 octobre 2014.
Lorsque j'ai reçu le renvoi du commissaire à l'intégrité du secteur public, j'avais déjà effectué un examen préliminaire de la question, étudié soigneusement les allégations de conduite répréhensible et conclu que l'information sur laquelle les allégations étaient fondées était trop hypothétiques. L'information ne me donnait aucun motif de croire qu'il y ait peut-être eu contravention au Code régissant les conflits d'intérêts des députés (le Code) ou à la Loi. En effet, l'individu même qui a fait la divulgation a affirmé que ses allégations n'étaient que des hypothèses. Dans une lettre datée du 20 août 2014, j'ai informé l'individu de ma décision de ne pas entreprendre d'enquête en vertu du Code ou d'étude en vertu de la Loi.
La lettre du 11 juillet 2014
Une lettre confidentielle datée du 11 juillet 2014 était adressée au Commissariat, au Commissariat à l'intégrité du secteur public et à l'agent supérieur de l'intégrité d'un ministère du gouvernement du Canada. L'auteur de la lettre indiquait qu'une pénalité pécuniaire avait été imposée relativement à un événement non autorisé à la suite d'une enquête menée par le secteur de la mise en application des lois d'un ministère du gouvernement du Canada. Peu après que la décision sur la pénalité a été rendue, le gestionnaire régional responsable de ce ministère a avisé, par téléphone, le directeur de la société ayant organisé l'activité que l'avis de pénalité pouvait être ignoré.
Selon les allégations, aucune instruction écrite n'a été fournie pour expliquer la décision d'annuler la pénalité et aucune lettre confirmant l'annulation n'a été envoyée. Il était aussi allégué que l'appel au directeur de la société avait été fait à la suite d'instructions verbales de la part d'agents responsables à Ottawa. L'auteur de la lettre précisait que la justification donnée pour l'annulation de la pénalité reposait sur une erreur administrative et que la pénalité devait être imposée de nouveau à une valeur supérieure.
La lettre précisait aussi que le député en question a assisté à l'événement, s'est entretenu avec les invités au nom du gouvernement du Canada et s'est fait photographier avec les participants. L'auteur de la lettre a indiqué dans celle-ci qu'il croyait que le député pourrait être intervenu dans cette affaire, à titre de faveur personnelle à un électeur, en demandant l'aide du ministre quant à la mise en œuvre de démarches pour annuler la pénalité. Il a écrit qu'il est évident que le ministre a donné des instructions au sous-ministre pour faire annuler la pénalité et que ces instructions ont probablement été transmises à tour de rôle aux divers agents responsables du ministère.
Suivi effectué par le Commissariat
Après avoir reçu la plainte en juillet 2014, le Commissariat a communiqué directement avec l'individu qui a fait la divulgation pour obtenir plus de renseignements.
L'individu a informé le Commissariat qu'il ne disposait d'aucune information précise pour étayer ses allégations d'une intervention politique d'un député, d'un ministre et d'un sous‑ministre, et qu'il ne pouvait qu'avancer des hypothèses sur ce qui s'était produit. Il a répété qu'il était au courant que le député a assisté à l'événement ayant fait l'objet d'une pénalité et a appuyé l'événement publiquement, mais il a affirmé qu'il ne faisait que présumer que l'électeur a approché le député afin de faire annuler la pénalité. Il a également dit au Commissariat qu'il ne disposait d'aucune information relative aux mesures prises par le député, le ministre ou le sous‑ministre pour faire annuler la pénalité et d'aucun élément de preuve indiquant que l'un d'entre eux est intervenu de quelconque façon.
Après avoir examiné attentivement la plainte écrite et les renseignements additionnels fournis au Commissariat par l'individu qui a fait la divulgation, j'ai écrit à cet individu le 20 août 2014 pour lui faire part de ma décision de ne pas amorcer d'enquête ou d'étude sur la question qu'il a soulevée.
J'ai informé l'individu qui a fait la divulgation que je peux, de ma propre initiative, entreprendre une enquête en vertu du paragraphe 27(4) du Code régissant les conflits d'intérêts des députés (le Code) ou une étude en vertu du paragraphe 45(1) de la Loi sur les conflits d'intérêts (la Loi) lorsque je suis mise au fait d'information me donnant des motifs raisonnables de croire qu'une contravention au Code ou à la Loi, selon le cas, a eu lieu.
J'ai avisé l'individu qu'à mon avis, l'information sur laquelle reposaient ses allégations était d'une nature trop hypothétique et ne me donnait aucune raison de croire que le député, le ministre ou le sous-ministre visés aient pu contrevenir à leurs obligations en vertu du Code ou de la Loi. Par conséquent, j'ai informé l'individu que je n'entreprendrais pas d'enquête en vertu du Code ou d'étude en vertu de la Loi à cet égard, mais je l'ai invité à communiquer de nouveau avec le Commissariat s'il obtenait de l'information supplémentaire lui permettant d'étayer ses allégations, afin que je puisse reconsidérer cette question à la lumière de tout nouvel élément de preuve.
Après avoir reçu le renvoi du commissaire à l'intégrité du secteur public, ce qui m'a obligé à publier ce rapport, le Commissariat a communiqué une fois de plus avec l'individu qui a fait la divulgation. Il n'a pu fournir aucune information additionnelle au Commissariat laissant entendre que le député, le ministre ou le sous-ministre étaient intervenus de quelconque façon dans cette affaire. J'ai également communiqué directement avec le sous-ministre. Ni lui ni aucun des agents responsables du ministère avec qui le Commissariat a communiqué n'ont pu fournir quelconque information concernant toute mesure prise par le député, le ministre ou le sous‑ministre pouvant laisser entendre que l'un d'entre eux est intervenu d'une façon ou d'une autre.
Conclusion
Le renvoi de la part du commissaire à l'intégrité du secteur public ne m'a fourni aucune information supplémentaire qui me permettrait d'entreprendre une enquête ou une étude relativement à cette question. Si d'autres renseignements sont divulgués par quelque source que ce soit, je demeure disposée à examiner cette information et à entreprendre une enquête ou une étude, au besoin.
Une allégation fondée uniquement sur des hypothèses, sans aucune information pour l'appuyer, ne peut constituer une raison de croire qu'une contravention a eu lieu.
Dans le présent rapport, je n'ai pas révélé l'identité du député, du ministre et du sous‑ministre visés dans cette affaire. Comme l'affaire n'a pas attiré l'attention des médias, j'ai décidé de ne pas révéler l'identité des individus nommés, car je n'ai aucun motif de croire que qui que ce soit d'entre eux a contrevenu au Code régissant les conflits d'intérêts des députés ou à la Loi sur les conflits d'intérêts. L'identification de ces individus pourrait nuire à leur réputation uniquement en raison d'allégations hypothétiques et non fondées.
En janvier 2013, j'ai recommandé au Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique, dans le contexte de l'examen quinquennal de la Loi sur les conflits d'intérêts, d'abroger l'article 68 de la Loi. Le Comité a appuyé cette recommandation.