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Renvoi du commissaire à l'intégrité du secteur public : le rapport Clement

​​​​Préface​

L​a Loi sur les conflits d’intérêts, L.C. 2006, ch. 9, art. 2 (la Loi), est entrée en vigueur le 9 juillet 2007.

Selon l’artic​​le 68 de la Loi, si la commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique est saisie d’une question renvoyée par le commissaire à l’intégrité du secteur public en vertu du paragraphe 24(2.1) de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles, elle doit fournir au premier ministre un rapport énonçant les faits, son analyse de la question et ses conclusions. La commissaire fournit également une copie de ce rapport au titulaire de charge publique ou ancien titulaire de charge publique faisant l’objet du rapport ainsi qu’au commissaire à l’intégrité du secteur public. Enfin, le rapport est rendu public. 

Résumé

Ce rapport, publié en vertu de la Loi sur les conflits d'intérêts (la Loi), porte sur trois préoccupations relatives à la conduite de l'honorable Tony Clement, député de
Parry Sound–Muskoka, pendant son mandat comme ministre de la Santé et ministre de l'Industrie.

La première préoccupation porte sur sa participation à une vidéo promotionnelle pour Lord & Partners Ltd., où il se présente comme ministre du gouvernement fédéral. La deuxième a trait aux trois contrats fédéraux attribués à cette entreprise. La troisième, elle, porte sur la nomination de M. George Young, réalisateur de la vidéo, à la Commission canadienne du tourisme. Selon les allégations, M. George Young et M. Barry Young, le président de Lord & Partners, étaient amis avec M. Clement. MM. George Young et Barry Young n'ont aucun lien de parenté.

Ces préoccupations ont été soulevées dans une divulgation que le commissaire à l'intégrité du secteur public, qui à l'époque occupait son poste par intérim, m'a renvoyée. Lorsqu'une question m'est renvoyée ainsi, je suis tenue, selon la Loi, de publier un rapport énonçant les faits et dans lequel j'expose mon analyse ainsi que mes conclusions.

Les renseignements qui m'ont été divulgués dans le renvoi ne m'ont donné aucun motif de croire que M. Clement avait contrevenu à la Loi. Cependant, afin de publier le rapport et puisque je considère approprié d'aborder les préoccupations soulevées publiquement et laissées sans réponses, j'ai cherché à recueillir de plus amples renseignements relatifs au rôle de M. Clement dans cette affaire et à ses liens avec MM. George Young et Barry Young.

Sur la foi des renseignements dont je dispose, je n'ai aucun motif de croire que M. Clement était, aux termes de la Loi, ami ni de M. George Young, ni de M. Barry Young.

En ce qui a trait à la participation de M. Clement à la vidéo promotionnelle, il n'y avait aucune preuve laissant croire qu'il a participé à la vidéo pour une raison autre que d'assister une entreprise située dans sa circonscription. Comme M. Clement s'est présenté en tant que ministre de la Santé dans la vidéo, je profite de l'occasion pour noter que lorsqu'ils s'acquittent de leurs obligations à titre de députés, les ministres doivent faire preuve de prudence. En répondant aux préoccupations de leurs électeurs, les ministres ne doivent pas se prévaloir de leur poste de ministre pour prêter à leurs électeurs une assistance particulière qu'ils ne prêteraient pas à d'autres Canadiens relativement à leur propre ministère ou portefeuille.

Pour ce qui est des trois contrats gouvernementaux attribués à Lord & Partners, je n'ai trouvé aucun élément de preuve qui m'amène à croire que M. Clement a joué un rôle dans l'attribution de contrats à cette entreprise.

En ce qui a trait au rôle qu'a joué M. Clement dans la nomination de M. George Young à la Commission canadienne du tourisme, comme susmentionné, j'ai conclu que M. Clement et M. George Young n'étaient pas amis aux termes de la Loi. Par conséquent, je n'ai trouvé rien qui suggère que la participation de M. Clement l'ait placé en situation de conflit d'intérêts au sens de la Loi.

J'ai donc conclu, en fonction des renseignements dont je disposais, qu'il n'y avait aucun motif d'approfondir mon enquête à ce sujet.

Renvoi

Le 28 juillet 2011, le commissaire à l'intégrité du secteur public, qui à l'époque occupait son poste par intérim, m'a renvoyé, en vertu du paragraphe 24(2.1) de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles, une divulgation reçue de la part d'un particulier en lien avec la conduite de l'honorable Tony Clement, député de
Parry Sound–Muskoka, pendant son mandat comme ministre de la Santé et par après comme ministre de l'Industrie.

Sans formuler d'allégations précises, la divulgation soulevait trois préoccupations et comportait un lien à un reportage de mai 2010.

La première préoccupation portait sur le fait que M. Clement avait participé à une vidéo promotionnelle pour une entreprise située dans sa circonscription, Lord & Partners Ltd., où il se présente comme ministre de la Santé du gouvernement canadien et salue le peuple chinois en son nom propre comme au nom du gouvernement du Canada. Dans le reportage, on décrit le président et chef de la direction de Lord & Partners, M. Barry Young, comme un ami de M. Clement.

La deuxième préoccupation avait trait aux trois contrats fédéraux, d'une valeur totale de 41 000 $, attribués à Lord & Partners.

La troisième préoccupation portait sur la nomination par M. Clement de M. George Young à la Commission canadienne du tourisme. M. George Young avait réalisé la vidéo pour
Lord & Partners et on l'avait qualifié de partisan de longue date de M. Clement.

La divulgation soulignait que l'article 4 de la Loi sur les conflits d'intérêts (la Loi), où il est défini ce que constitue un conflit d'intérêts aux fins d'application de la Loi, était pertinent dans le cas de ces trois préoccupations.

Demandes antérieures d'étude et conseils donnés

En mai 2010, les médias ont rapporté que M. Clement avait participé à une vidéo promotionnelle pour Lord & Partners Ltd., une entreprise située dans sa circonscription. Le réalisateur de la vidéo, M. George Young, y était qualifié de partisan politique et ami de M. Clement; le président de Lord & Partners, M. Barry Young, y avait aussi le titre d'ami
de M. Clement.

Les médias ont également rapporté que Lord & Partners avait reçu trois contrats de la part du ministère de la Défense nationale et que M. Clement avait nommé M. George Young à la Commission canadienne du tourisme.

À cette époque, j'ai reçu deux demandes distinctes d'étude de la part de députés relatives à ces préoccupations.

Après étude de nos dossiers, le Commissariat a découvert que, le 12 août 2008, un membre du personnel de M. Clement avait téléphoné au Commissariat pour discuter du fait que M. Clement avait reçu une demande de la part d'un de ses électeurs de participer à une vidéo promotionnelle pour Lord & Partners. Le membre du personnel s'informait s'il était convenable, selon la Loi sur les conflits d'intérêts (la Loi), que M. Clement y participe. Il avait alors dit au Commissariat que M. Clement ne recevrait aucune compensation financière pour sa participation et qu'il n'y parrainerait ni l'entreprise, ni ses produits.

Le Commissariat a fourni le conseil confidentiel au membre du personnel de M. Clement comme quoi sur la foi des renseignements donnés, la Loi n'empêchait pas ce dernier de participer à la vidéo. Les liens de M. Clement avec M. Barry Young ou avec M. George Young n'ont pas été discutés à ce moment.

Après avoir obtenu le consentement de M. Clement, j'ai fait part du conseil confidentiel aux deux députés auteurs de la demande d'étude. Je les ai informés que je n'enquêterais pas sur la participation de M. Clement à la vidéo promotionnelle à moins de recevoir des renseignements à l'appui des allégations.

J'ai également informé le député qui avait soulevé dans sa demande d'étude la question de la nomination de M. George Young que j'aurais besoin de plus amples renseignements concrets qui pourraient venir à l'appui des allégations contre M. Clement.

Ces députés ne m'ont fourni aucun autre renseignement.

Processus

Selon la Loi sur les conflits d'intérêts (la Loi), je suis tenue de publier un rapport public où j'expose mon analyse et mes conclusions lorsque je reçois un renvoi du commissaire à l'intégrité du secteur public. Si l'objet du renvoi relève de la compétence de mon Commissariat et si j'ai des motifs de croire qu'il y a eu contravention à la Loi, je peux entreprendre une étude de mon propre chef en vertu de l'article 45 de la Loi. Cependant, l'article 68 de la Loi exige que je publie un rapport, que je décide d'entreprendre une étude ou non. Une description plus détaillée du processus de renvois provenant du commissaire à l'intégrité du secteur public et des dispositions législatives pertinentes se trouve à l'annexe I.

Les renseignements qui m'ont été divulgués dans le renvoi ne me donnaient aucune raison de penser que M. Clement avait contrevenu à la Loi. Cependant, afin de publier le rapport et puisque je considère approprié d'aborder les préoccupations soulevées publiquement par les médias et laissées sans réponses, j'ai cherché à recueillir de plus amples renseignements relatifs au rôle de M. Clement concernant ces préoccupations et à ses liens avec MM. George Young et Barry Young.

Le 30 août 2011, j'ai écrit à M. Clement pour l'aviser du renvoi et l'informer que j'allais approfondir la question et préparer un rapport conformément à l'article 68 de la Loi. Je l'ai informé que les dispositions de la Loi qui pouvaient s'appliquer étaient le paragraphe 6(1), qui interdit à un titulaire de charge publique de prendre une décision qui le placerait en situation de conflit d'intérêts; l'article 7, qui porte sur les traitements de faveur; et l'article 9, qui interdit de se prévaloir de ses fonctions officielles pour influencer une décision dans le but de favoriser de façon irrégulière l'intérêt personnel d'une autre personne.

J'ai informé M. Clement que je prendrais en considération, d'une part, les articles 7 et 9 relativement à sa participation à la vidéo promotionnelle et, d'autre part, le paragraphe 6(1) relativement à l'attribution de contrats fédéraux à l'entreprise de M. Barry Young, Lord & Partners, et à la nomination de M. George Young à la Commission canadienne de tourisme.

Le 2 novembre 2011, j'ai reçu une lettre de Me Arthur Hamilton, avocat de M. Clement, dans laquelle il énonçait la réponse de ce dernier aux allégations. Le 2 février 2012, j'ai effectué une entrevue avec M. Clement. En mars 2012, le Commissariat a interviewé MM. Barry Young et George Young.

À la suite de ces entrevues et après analyse de tous les renseignements dont je disposais, j'ai déterminé que je n'avais toujours aucun motif de croire qu'il y avait eu contravention à la Loi et, par conséquent, je n'ai pas entrepris d'étude. Je publie cependant ce rapport conformément à l'article 68 de la Loi.

Conformément à la procédure que j'ai établie, M. Clement a eu la possibilité de commenter et de présenter des observations additionnelles sur les sections factuelles du rapport (Renvoi, Demandes antérieures d'étude et conseils donnés, Processus, Renseignements recueillis et les annexes) avant qu'il ne soit achevé.

Renseignements recueillis

Les trois préoccupations soulevées dans le renvoi (la participation de M. Clement à une vidéo promotionnelle, l'attribution de contrats fédéraux à Lord & Partners et la nomination de M. George Young à la Commission canadienne du tourisme) portaient sur des liens d'amitié potentiels entre M. Clement et MM. Barry Young et George Young, que certains reportages avaient évoqués dans les médias de 2010. J'ai donc cherché à comprendre non seulement le rôle de M. Clement dans les préoccupations soulevées, mais aussi ses liens avec les deux autres personnes.

Lord & Partners et la vidéo promotionnelle

Lord & Partners, fondé à Huntsville (Ontario) en 1990, fabrique et fournit des solvants, des produits nettoyants et des produits de spécialité respectueux de l'environnement pour usage commercial et industriel.

Monsieur Barry Young est le président et le chef de direction de Lord & Partners. En 2008, il cherchait à étendre ses activités en Chine. Il a engagé M. George Young, qui habite également à Huntsville où il dirige une entreprise de production de vidéo, pour réaliser une vidéo promotionnelle en vue de son prochain voyage d'affaires en Chine. MM. Barry Young et George Young n'ont aucun lien de parenté.

Monsieur Barry Young a communiqué avec le bureau de circonscription de M. Clement pour lui demander de participer à la vidéo promotionnelle. M. Barry Young a expliqué au Commissariat qu'il avait demandé à M. Clement de participer à la vidéo puisqu'il pensait important que la population chinoise sache que Lord & Partners était connu par le gouvernement du Canada.

Selon M. Clement, ses liens avec M. Barry Young sont du type de député élu et d'électeur. Tant M. Clement que M. Young ont dit au Commissariat qu'ils s'étaient rencontrés vers la fin de 2008, après la réélection de M. Clement à la Chambre des communes pour la circonscription de Parry Sound–Muskoka. M. Barry Young a dit au Commissariat qu'il s'était présenté à M. Clement lors d'une activité communautaire organisée par M. Clement à Huntsville, et qu'il lui avait alors parlé de son entreprise, Lord & Partners.

Messieurs Clement et Young ont tous deux précisé au Commissariat qu'ils ne se voient pas en contexte social et qu'ils ne sont pas amis. MM. Clement et Young ont tous deux dit au Commissariat que ni M. Clement ni quelque membre de sa famille n'ont d'intérêts financiers dans Lord & Partners.

Monsieur George Young a dit au Commissariat, en sa qualité de réalisateur de la vidéo, qu'il avait lui aussi abordé M. Clement pour lui demander de participer à la vidéo. Selon M. George Young, M. Clement lui a répondu qu'il devait d'abord en avoir l'autorisation de la part du Commissariat.

Comme susmentionné, le 12 août 2008, un membre du personnel de M. Clement a téléphoné au Commissariat pour demander conseil; sur la foi des renseignements donnés, il a reçu comme conseil que la Loi n'empêchait pas M. Clement de participer à la vidéo.

Dans la vidéo, M. Clement se présente comme député de Parry Sound–Muskoka et comme ministre de la Santé pour le Canada. Il salue la population chinoise au nom du gouvernement du Canada en tant que député et ministre de la Santé. Il décrit les défis environnementaux auxquels les deux pays sont confrontés et explique le lien entre l'environnement et les soins de santé. Il mentionne également la possibilité de tisser de nouveaux liens entre le Canada et la Chine dans le domaine de l'environnement. C'est alors qu'il présente M. Barry Young et son entreprise, Lord & Partners. Une transcription de cette présentation se trouve à l'annexe II.

Monsieur Clement et M. Barry Young ont tous deux confirmé au Commissariat que M. Clement n'avait reçu aucune compensation financière pour sa participation à la vidéo. Ce dernier m'a dit que, sur la foi du conseil du Commissariat, il a accepté de se présenter dans la vidéo puisqu'il croit que l'expansion des activités économiques des entreprises canadiennes est bénéfique pour sa circonscription ainsi que pour le Canada.

Lettres d'appui

Monsieur Clement m'a dit qu'il avait également écrit, à titre de député, deux lettres de présentation pour M. Barry Young, à la demande de ce dernier.

Dans la première, datée du 12 août 2008 et qui accompagnait la vidéo promotionnelle de l'entreprise, il transmettait ses salutations à la République populaire de Chine au nom du gouvernement du Canada et présentait M. Barry Young ainsi que son entreprise, Lord & Partners.

La seconde lettre, datée du 30 mars 2010, encourageait une personne de Dubai à envisager de travailler avec M. Barry Young à l'avenir. Il y déclarait que Lord & Partners était situé dans sa circonscription et qu'il connaissait M. Barry Young et son entreprise depuis quelques années.

Bien qu'il ne reçoive pas souvent de demandes de participer à des vidéos promotionnelles, M. Clement m'a expliqué qu'il reçoit souvent dans l'année des demandes de la part d'électeurs qui désirent un appui quelconque de sa part, notamment sous forme de lettre. M. Clement se souvenait d'avoir participé à une vidéo pour la Hospital for Sick Children de Toronto (hôpital pour enfants malades) lorsqu'il était ministre de la Santé.

Attribution de contrats fédéraux à Lord & Partners

En 2010, les médias ont rapporté que Lord & Partners avait reçu trois contrats du gouvernement fédéral pour une valeur totale de 41 000 $. Selon la page Web de divulgation des renseignements en matière d'approvisionnement de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, Lord & Partners a reçu trois contrats totalisant 50 226 $ de la part du ministère de la Défense nationale entre 2009 et 2010. En 2009, deux contrats ont été attribués dans le cadre d'un processus non concurrentiel à cause de leur faible valeur. La valeur combinée de ces contrats était de 29 226 $. En 2010, l'entreprise a reçu un contrat de 21 000 $ à la suite d'un processus d'approvisionnement concurrentiel. 

Monsieur Clement affirme que ni lui ni quiconque de son bureau ministériel n'ont fait de lobbying ou de promotion en faveur de l'attribution de ces contrats à Lord & Partners et qu'il n'y connaissait rien jusqu'à ce que les médias en fassent état en 2010. M. Barry Young a dit au Commissariat qu'il était au courant d'aucune forme de participation de la part de M. Clement visant à favoriser l'attribution de contrats gouvernementaux à Lord & Partners. Aucun renseignement qui figure dans les reportages des médias, dans les demandes reçues des députés en 2010 ou dans les renvois reçus du commissaire par intérim à l'intégrité du secteur public n'indique que M. Clement ait participé à ces processus d'approvisionnement, que ce soit de façon directe ou indirecte.

Nomination de M. George Young à la Commission canadienne du tourisme

Monsieur Clement m'a dit qu'il avait rencontré M. George Young après son élection à la Chambre des communes en 2006. À cette époque, M. Young était conseiller municipal à la ville de Hunstville. MM. Clement et Young ont tous deux déclaré qu'ils se voyaient et interagissaient souvent l'un avec l'autre lors d'activités politiques municipales et fédérales.

En 2009, M. Clement était ministre de l'Industrie, responsable de la Commission canadienne du tourisme. Le 15 octobre 2009, M. Clement a annoncé la nomination de M. George Young pour un mandat de quatre ans au conseil d'administration de ladite Commission. La nomination à temps partiel ne donne pas lieu à un salaire.

Monsieur Young a été nommé par décret. Comme il y est énoncé, la nomination de M. Young a été approuvée par le gouverneur en conseil sur la recommandation de M. Clement, en sa qualité de ministre de l'Industrie, conformément à l'article 11 de la Loi sur la Commission canadienne du tourisme.

Monsieur Young a dit au Commissariat que M. Clement avait communiqué avec lui pour lui demander si un poste à ladite Commission l'intéresserait. Il a cru comprendre que M. Clement le recommandait à ce poste à cause de son expérience et de l'intérêt qu'il porte aux sports et au tourisme.

Monsieur Clement m'a dit que M. George Young avait été sélectionné pour une nomination à la Commission canadienne du tourisme en fonction de ses compétences et de son expérience comme journaliste à la Canadian Broadcasting Corporation, et de son expérience à la couverture des derniers Jeux olympiques. Selon M. Clement, M. Young était un bon candidat pour ladite Commission dans le contexte des Jeux olympiques 2010 de Vancouver et du Sommet du G8 à Huntsville.

Monsieur Clement et M. George Young ont tous deux confirmé l'appui politique de ce dernier à M. Clement, dans le sens qu'ils partagent des points de vue similaires en tant que politiciens de Huntsville – M. Clement en tant que député de Parry Sound–Muskoka et M. Young en tant que conseiller municipal à la ville de Huntsville. Toutefois, M. Young a affirmé au Commissariat qu'il n'a jamais contribué financièrement à la Parry Sound–Muskoka Conservative Electoral District Association, ni participé à l'une ou l'autre des campagnes électorales de M. Clement.

Monsieur Clement m'a expliqué que, bien qu'ils entretiennent une relation professionnelle, lui et M. Young ne sont pas amis. Ils n'entretiennent aucune relation personnelle et ils ne se voient pas dans un contexte social. M. Young a déclaré que, bien qu'il considère M. Clement comme un ami, leurs relations ne sont que d'ordre professionnel.

Monsieur Clement m'a affirmé qu'il avait préparé la recommandation de la candidature de M. George Young en vue de son étude par le Cabinet du premier ministre, qui a par la suite pris la décision de nommer M. Young à ce poste. M. Young a affirmé au Commissariat que M. Clement ne lui avait rien promis quant à cette nomination potentielle.

Monsieur Clement m'a affirmé qu'à titre de ministre, il lui arrive régulièrement de recommander des personnes à des postes divers et de participer à différents stades du processus de nomination.

Analyse et CONCLUSIONS

Rôle dans la réalisation de la vidéo promotionnelle : articles 7 et 9

Article 7

L'article 7 interdit l'accord d'un traitement préférentiel à une personne ou un organisme en fonction du représentant de la personne ou de l'organisme en question dans les termes suivants :

7. Il est interdit à tout titulaire de charge publique d'accorder, dans l'exercice de ses fonctions officielles, un traitement de faveur à une personne ou un organisme en fonction d'une autre personne ou d'un autre organisme retenu pour représenter l'un ou l'autre.

Selon moi, on peut comprendre qu'en se présentant comme ministre de la Santé et en saluant la population chinoise et la République populaire de Chine en son nom propre et au nom du gouvernement du Canada, M. Clement exerçait une fonction officielle au sens de l'article 7.

Quant au traitement préférentiel, je n'ai trouvé aucune preuve laissant croire que M. Clement a participé à la vidéo pour une raison autre que d'assister une entreprise canadienne située dans sa circonscription. Dans ce contexte, M. Clement a donné en exemples d'autres situations où des électeurs ont demandé son appui.

Monsieur Clement m'a affirmé qu'il a accepté de se présenter dans la vidéo puisqu'il croit que l'expansion des activités économiques des entreprises canadiennes est bénéfique pour sa circonscription ainsi que pour le Canada. J'accepte qu'il s'agisse bien là de sa motivation à participer à la vidéo.

Article 9

L'article 9 interdit au titulaire de charge publique de se prévaloir de ses fonctions officielles pour influencer des décisions si, ce faisant, il se trouve en situation de conflit d'intérêts. En voici le libellé :

9. Il est interdit à tout titulaire de charge publique de se prévaloir de ses fonctions officielles pour tenter d'influencer la décision d'une autre personne dans le but de favoriser son intérêt personnel ou celui d'un parent ou d'un ami ou de favoriser de façon irrégulière celui de toute autre personne.

La vidéo ne semble pas avoir été réalisée dans le but d'influencer la décision de quiconque ni même dans le contexte d'une prise de décision particulière. Elle semble plutôt avoir été conçue pour faire connaître les activités commerciales de Lord & Partners auprès d'un vaste échantillon de la population chinoise.

De plus, sur la foi des renseignements dont je dispose, je n'ai aucun motif de croire que M. Clement et M. Barry Young étaient amis aux termes de la Loi, ou que M. Clement était motivé à participer à la vidéo pour des raisons personnelles ou privées. Dans ces circonstances, je ne vois rien d'inapproprié à ce que M. Clement aide une entreprise canadienne à faire la promotion de ses produits à l'échelle internationale. Pour ces raisons, rien ne me permet de croire que M. Clement a contrevenu à l'article 9 en lien avec sa participation à la vidéo promotionnelle pour Lord & Partners.

Sur la foi des renseignements dont je dispose, rien ne justifie d'enquêter davantage sur la participation de M. Clement à cette vidéo.

J'ajouterais toutefois une mise en garde. Dans la vidéo promotionnelle, M. Clement s'est présenté non seulement comme député de Parry Sound–Muskoka, mais également comme ministre de la Santé du Canada. Il croyait que ce serait bénéfique, tant pour sa circonscription que pour le Canada, de faire la promotion d'une entreprise canadienne désirant accroître ses activités économiques. Dans le cas actuel, l'entreprise en question était située dans la circonscription de M. Clement.

J'ai souligné dans Le rapport Paradis que je comprends que les ministres, à titre de députés, ont des obligations envers leurs électeurs. Toutefois, lorsqu'ils s'acquittent de ces obligations, les ministres doivent faire preuve de prudence. En répondant aux préoccupations de leurs électeurs, les ministres ne doivent pas se prévaloir de leur poste de ministre pour prêter à leurs électeurs une assistance particulière qu'ils ne prêteraient pas à d'autres Canadiens relativement à leur propre ministère ou portefeuille.

Rôle dans l'attribution de contrats fédéraux à Lord & Partners : paragraphe 6(1)

Le paragraphe 6(1) interdit à tout titulaire de charge publique de prendre une décision qui le placerait en situation de conflit d'intérêts.

6.(1) Il est interdit à tout titulaire de charge publique de prendre une décision ou de participer à la prise d'une décision dans l'exercice de sa charge s'il sait ou devrait raisonnablement savoir que, en prenant cette décision, il pourrait se trouver en situation de conflit d'intérêts.


L'article 4 définit les circonstances dans lesquelles un titulaire de charge publique pourrait être perçu comme étant en « situation de conflit d'intérêts » au sens de la Loi. En voici le libellé :

4. Pour l'application de la présente loi, un titulaire de charge publique se trouve en situation de conflit d'intérêts lorsqu'il exerce un pouvoir officiel ou une fonction officielle qui lui fournit la possibilité de favoriser son intérêt personnel ou celui d'un parent ou d'un ami ou de favoriser de façon irrégulière celui de toute autre personne. 


Comme il a été mentionné antérieurement, Lord & Partners a obtenu deux contrats à fournisseur unique en 2009 de la part du ministère de la Défense nationale et en a soumissionné avec succès un troisième en 2010. M. Clement a affirmé que ni lui ni quiconque de son bureau ministériel n'a fait de lobbying ou de promotion en faveur de l'attribution de contrats du ministère de la Défense nationale à Lord & Partners, en ajoutant qu'il n'y connaissait rien jusqu'à ce que les médias en fassent état, en 2010. M. Barry Young a confirmé auprès du Commissariat qu'il n'était au courant d'aucune forme de participation de la part de M. Clement dans l'attribution de contrats gouvernementaux à Lord & Partners. Aucun renseignement qui figure dans les reportages des médias, dans les demandes reçues des députés en 2010 ou dans les renvois reçus du commissaire par intérim à l'intégrité du secteur public n'indique que M. Clement ait participé à ces processus d'approvisionnement, que ce soit de façon directe ou indirecte.

Je n'ai trouvé aucun élément de preuve qui m'amène à croire que M. Clement a joué un rôle dans l'attribution de ces contrats. Je conclus donc qu'il n'y a pas lieu d'approfondir l'examen de la question.

Rôle dans la nomination de M. George Young à la Commission canadienne du tourisme : paragraphe 6(1)

Comme susmentionné, M. Clement a recommandé M. George Young pour nomination au conseil d'administration de la Commission canadienne du tourisme conformément à l'article 11 de la Loi sur la Commission canadienne du tourisme. Ce faisant, il exerçait manifestement sa charge.

Quant à savoir si le rôle de M. Clement dans la nomination de M. George Young l'a placé en situation de conflit d'intérêts, j'ai conclu que MM. Clement et Young n'étaient pas amis au sens de la Loi. Même s'ils ont été qualifiés d'amis dans bon nombre d'articles de presse, ces reportages n'ont fourni aucun renseignement à l'appui de cette information. Je n'ai rien trouvé qui indique que les liens entre M. Clement et M. George Young s'étendaient au-delà de leurs interactions professionnelles à titre de politiciens au service de Huntsville – M. Clement, comme député de Parry Sound–Muskoka, et M. Young comme conseiller municipal à la ville de Huntsville.

Il incombait à M. Clement, en sa qualité de ministre de l'Industrie, de recommander des candidats pour nomination à la Commission canadienne du tourisme, conformément à l'article 11 de la Loi sur la Commission canadienne du tourisme. M. Clement m'a affirmé que M. George Young avait été sélectionné en fonction de ses compétences de journalistes à la Canadian Broadcasting Corporation et de son expérience acquise en faisant la couverture des derniers Jeux olympiques, ainsi que sur la perception qu'il était le bon candidat pour ladite Commission. Il n'y a aucune preuve laissant croire que M. Clement a dérogé du processus type en matière de nomination par le gouverneur en conseil.

Monsieur Clement et M. George Young ont tous deux qualifié ce dernier de partisan politique à l'appui de M. Clement puisqu'ils partagent des points de vue sur le plan politique. Je ne crois pas que cette affirmation en soi ne me fournisse les motifs nécessaires pour penser que M. Clement aurait favorisé de façon irrégulière les intérêts personnels de M. Young lorsqu'il l'a recommandé pour nomination à ce poste.

Je conclus donc qu'il n'y a aucune raison de croire que la participation de M. Clement dans la nomination de M. George Young à la Commission canadienne du tourisme l'a placé en situation de conflit d'intérêts au sens de la Loi, et, par conséquent, qu'il n'y a aucune raison de croire qu'il aurait contrevenu au paragraphe 6(1).

Annexe I - Processus pour les questions renvoyées par le commissaire à l'intégrité du secteur public

Le paragraphe 24(2.1) de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles oblige le commissaire à l'intégrité du secteur public à saisir le Commissariat aux conflits d'intérêts et à l'éthique de tout cas de divulgation reçu s'il estime que la question relève de mon mandat. En voici le libellé :

24(2.1) Dans le cas où il estime que l'objet d'une divulgation ou d'une éventuelle enquête porte sur une question relevant de la compétence du commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique au titre de la Loi sur les conflits d'intérêts, le commissaire est tenu de refuser de donner suite à la divulgation ou de commencer l'enquête et d'en saisir le commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique.


L'article 68 de la Loi sur les conflits d'intérêts (la Loi) stipule que si je suis saisie d'une question en vertu de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles par le commissaire à l'intégrité du secteur public, je suis tenue de publier un rapport énonçant les faits en question ainsi que mon analyse de la question et mes conclusions. En voici le libellé :

68. Si le commissaire est saisi d'une question en vertu du paragraphe 24(2.1) de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles, il est tenu : 

a) de fournir au premier ministre un rapport énonçant les faits, son analyse de la question et ses conclusions; 
b) de fournir une copie du rapport à l'intéressé; 
c) de fournir une copie au commissaire à l'intégrité du secteur public; 
d) de rendre public le rapport.


Bien que l'article 68 de la Loi m'oblige à fournir un rapport, je ne suis pas tenue, selon mon interprétation, de procéder à une étude de chaque renvoi. À mon avis, je dois examiner les demandes provenant du commissaire à l'intégrité du secteur public de la même façon que je le ferais pour les demandes reçues de tout autre agent du Parlement ou du public concernant une contravention possible à la Loi.

Si, à la lumière d'informations reçues de la part d'un particulier ou dont je suis saisie en vertu de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles, j'ai des motifs de croire qu'on a contrevenu à la Loi et que je conclus qu'une étude s'impose, j'étudierai la question en vertu de l'article 45 de la Loi.

À l'inverse, si aucun motif ne me porte à croire qu'on a contrevenu à la Loi, je peux, là où il convient de le faire, demander des renseignements supplémentaires, notamment auprès du divulgateur, de l'intéressé ou de toute autre personne susceptible de posséder des renseignements pertinents. En me fondant ensuite sur les renseignements recueillis, je réévalue la question, à savoir si j'ai des motifs de croire qu'il y a eu une contravention à la Loi et, le cas échéant, si une étude s'impose.

Aux termes de l'article 68, je suis tenue de publier un rapport même si je ne procède pas à l'étude.

Annexe II - Transcription : TONY CLEMENT dans la vidéo promotionnelle de LORD & PARTNERS

[traduction] « Je me présente, Tony Clement. Je suis député de Parry Sound–Muskoka et du gouvernement du Canada, et je suis ministre de la Santé pour le Canada.

D’abord et avant tout, je désire saluer la population chinoise et la République populaire de Chine, en mon nom et au nom du gouvernement du Canada.

Nous savons réciproquement que nos deux pays sont confrontés à des défis environnementaux et que les gens se préoccupent de sécurité environnementale. En effet, j’ai affirmé par le passé que l’environnement et les soins de santé sont intrinsèquement liés. Il n’est d’ailleurs pas facile de parler d’environnement sans aussi aborder les diverses façons par lesquelles nous pouvons améliorer la santé et la sécurité des Canadiens ou des Chinois.

Voilà un domaine où tous peuvent se retrouver gagnants. Nous pouvons accroître la santé et la sécurité des gens non seulement au Canada, mais aussi en Chine, et nous pouvons également créer un merveilleux nouveau lien entre le Canada et la Chine dans le domaine de l’environnement. C’est dans ce contexte que j’ai l’honneur de vous présenter M. Barry Young, président et chef de la direction de Lord & Partners. Il vous parlera un peu plus de son entreprise. »​​​​


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