Ignorer les commandes du ruban
Passer au contenu principal

Rapport Scott

Table des matières

​PRÉFACE

La Loi sur les conflits d'intérêts (la Loi), L.C. 2006, ch. 9, art. 2, est entrée en vigueur le 9 juillet 2007.

En vertu de l'article 68 de la Loi, si le commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique est saisi d'une question par le commissaire à l'intégrité du secteur public en vertu du paragraphe 24(2.1) de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles, il est tenu de fournir au premier ministre un rapport énonçant les faits, son analyse de la question et ses conclusions. Il doit aussi fournir une copie du rapport à la personne titulaire de charge publique ou à l'ex-titulaire de charge publique concerné et au commissaire à l'intégrité du secteur public. Le rapport est également rendu public.​​​​​​​

SOMMAIRE

Le présent rapport marque la fin de mon étude d'une question dont j'ai été saisi par le commissaire à l'intégrité du secteur public conformément au paragraphe 24(2.1) de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles. La question concernait une allégation de conflit d'intérêts visant M. Ian Scott, président et premier dirigeant du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC).

Il a été allégué que M. Scott avait eu plusieurs rencontres avec de grands fournisseurs de télécommunications alors que ces derniers avaient des dossiers ouverts et actifs devant le CRTC. Il s'agirait d'un conflit d'intérêts apparent en contravention au Code de valeurs et d'éthique du secteur public et aux pratiques du CRTC. Comme l'explique le Rapport Trudeau III, les conflits d'intérêts apparents ne sont pas visés par les interdictions de la Loi sur les conflits d'intérêts (la Loi).

L'une des rencontres en question a eu lieu dans un pub d'Ottawa le 19 décembre 2019 avec M. Mirko Bibic, qui était alors chef de l'exploitation de BCE Inc. et Bell Canada puis est devenu président et chef de la direction de BCE Inc. en janvier 2020. La semaine avant la réunion, Bell Canada avait déposé auprès du CRTC une demande de révision et de modification d'une ordonnance de télécom d'août 2019. M. Scott faisait partie du comité du CRTC qui a rendu une décision de télécom en mai 2021 modifiant l'ordonnance de télécom d'août 2019.

M. Bibic a été décrit dans un article de presse de février 2020 comme un ami de M. Scott. J'avais des préoccupations qu'en ayant participé à la prise de la décision de télécom de mai 2021, M. Scott ait pu avoir la possibilité de favoriser l'intérêt personnel d'un ami ou de favoriser de façon irrégulière ceux d'une société dont le président et chef de la direction était un ami, ce qui contrevient au paragraphe 6(1) de la Loi. Le paragraphe 6(1) interdit aux titulaires de charge publique de prendre une décision ou de participer à la prise d'une décision qui favorise leurs intérêts personnels ou ceux d'un parent ou d'un ami, ou de favoriser de façon irrégulière celui de toute autre personne.

En tenant compte de l'interprétation du terme « ami » établie dans le Rapport Watson et élargie dans le Rapport Morneau II, la relation entre M. Scott et M. Bibic n'en était pas une d'amitié au sens de la Loi puisque leur relation est demeurée exclusivement professionnelle, bien qu'ils aient travaillé au sein du même secteur depuis plus de 20 ans. Par conséquent, je n'avais plus aucune préoccupation que M. Scott ait pu contrevenir au paragraphe 6(1) de la Loi lorsqu'il a participé à la décision de télécom de mai 2021.

À la lumière de ce qui précède, je n'avais donc aucun motif de croire que M. Scott ait pu contrevenir à la Loi. Par conséquent, je n'ai pas amorcé d'étude conformément à l'article 45 de la Loi et je considère l'affaire close.

RENVOI

En v​ertu de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles, le commissaire à l'intégrité du secteur public a le mandat d'examiner les divulgations d'actes répréhensibles faites par des fonctionnaires et de produire des rapports d'examen. Cependant, dans les cas où l'objet d'une divulgation porte sur une question relevant de ma compétence à titre de commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique, le commissaire à l'intégrité du secteur public doit, conformément au paragraphe 24(2.1) de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles, me saisir de la question.

Si, après avoir été saisi d'une question en ce sens, j'ai des motifs de croire que la personne titulaire de charge publique ou ex-titulaire de charge publique qui fait l'objet de la question a contrevenu à la Loi sur les conflits d'intérêts (la Loi), je peux entreprendre une étude en vertu de l'article 45 de la Loi. Même si je décide de ne pas amorcer d'étude, je suis tout de même tenu, conformément à l'article 68 de la Loi, de produire un rapport public énonçant les faits, mon analyse de la question et mes conclusions.

Dans le cas présent, dans une lettre datée du 20 avril 2022, que j'ai reçue le 28 avril 2022, le commissaire à l'intégrité du secteur public m'a saisi, en vertu du paragraphe 24(2.1) de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles, de la divulgation par un membre du public d'un acte répréhensible commis par un titulaire de charge publique principal, M. Ian Scott. M. Scott a été nommé membre à temps plein du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) et désigné comme président et premier dirigeant (président) pour un mandat de cinq ans le 5 septembre 2017.

Selon la personne ayant fait la divulgation, M. Scott a commis des actes répréhensibles en tenant plusieurs réunions ex parte[1​] seul à seul avec d'importants fournisseurs de services de télécommunications alors qu'ils avaient des dossiers ouverts et actifs devant le CRTC. Ce faisant, M. Scott a contrevenu au Code de valeurs et d'éthique du secteur public et aux pratiques du CRTC en omettant d'éviter les conflits d'intérêts apparents.

À l'appui des faits qu'elle allègue, la personne ayant fait la divulgation a présenté plusieurs documents, dont des communications inscrites dans le Registre des lobbyistes, qui montrent que M. Scott a rencontré seul à seul de grands fournisseurs de services de télécommunications.

Au no​mbre des documents joints au renvoi, tels que des articles de presse et des documents reçus dans le cadre d'une demande d'accès à l'information et aux renseignements personnels, plusieurs portent sur une réunion que M. Scott a eue avec M. Mirko Bibic, alors chef de l'exploitation de BCE Inc. et Bell Canada, dans un pub d'Ottawa le 19 décembre 2019. En janvier 2020, M. Bibic est devenu président et chef de la direction de BCE Inc. et Bell Canada. Un exemplaire non caviardé du calendrier Outlook de M. Scott, qui a plus tard été rendu public, indiquait que la rencontre du 19 décembre 2019 était de nature « sociale ».

Selon la personne ayant fait la divulgation, Bell Canada a, une semaine avant la réunion du 19 décembre 2019, déposé auprès du CRTC une demande de révision et de modification de l'ordonnance de télécom rendue en août 2019 en vertu de laquelle le CRTC a approuvé de manière définitive les tarifs des services d'accès à haute vitesse (AHV) de gros groupés[2​].

Un article de presse paru le 1er février 2022 inclus dans le renvoi porte sur une entrevue que le média a eue avec M. Scott. Il y est mentionné que ce dernier était l'un des neuf membres votants du comité du CRTC qui a rendu la décision de télécom de mai 2021[3​] modifiant l'ordonnance de télécom d'août 2019. De plus, il y est décrit que la rencontre entre M. Scott et M. Bibic dans un pub d'Ottawa le 19 décembre 2019 était une rencontre entre amis.

PROCESSUS

Le ​16 mai 2022, j'ai écrit à M. Scott pour l'informer que j'avais été saisi d'un renvoi alléguant qu'il a tenu des réunions ex parte avec d'importants fournisseurs de services de télécommunications. Je l'ai invité à formuler des observations sur les faits allégués.

De plus, j'ai demandé à M. Scott de répondre à une de mes préoccupations concernant la description faite par les médias de sa relation avec M. Bibic, décrite comme étant une relation amicale. Je craignais qu'en ayant participé à la prise de la décision de télécom de mai 2021 modifiant l'ordonnance de télécom d'août 2019 concernant les tarifs des services d'accès à haute vitesse de gros groupés, M. Scott ait pu avoir la possibilité de favoriser les intérêts personnels d'un ami ou de favoriser indûment ceux d'une société, dont le président et chef de la direction était un ami, en contravention au paragraphe 6(1) de la Loi sur les conflits d'intérêts (la Loi).

Le paragraphe 6(1) de la Loi interdit en effet aux titulaires de charge publique de prendre une décision ou de participer à la prise d'une décision qui favorise leurs intérêts personnels ou ceux de leurs parentes ou parents ou d'amies ou d'amis, ou qui favorise indûment les intérêts personnels d'une autre personne.

Par conséquent, j'ai demandé à M. Scott de fournir une description détaillée de sa relation avec M. Bibic, y compris son point de vue sur la question de savoir s'il considérait M. Bibic comme un ami. Je lui ai demandé de fournir des renseignements détaillés sur la rencontre du 19 décembre 2019, notamment son origine, sa raison d'être, tous les sujets abordés et qui a payé toute boisson ou repas. Je lui ai également demandé s'il avait l'habitude de rencontrer des intervenantes et intervenants du CRTC dans des lieux publics et j'ai demandé des exemples d'autres rencontres de ce type.

J'ai informé M. Scott que je tiendrais compte de sa réponse en vue de déterminer si je devais procéder à la publication d'un rapport en vertu de l'article 68 de la Loi sans avoir à recueillir de renseignements supplémentaires ou si je devais commencer une étude de la question en vertu de l'article 45 de la Loi.

Dans une lettre datée du 10 juin 2022, M. Scott a répondu aux faits allégués par la personne ayant fait la divulgation et à la préoccupation que j'ai soulevée.

Après avoir examiné la réponse de M. Scott, ainsi que les renseignements contenus dans le renvoi et dans le domaine public, j'ai établi que je n'avais aucun motif de croire que M. Scott avait contrevenu à la Loi. Par conséquent, je n'ai pas amorcé d'étude de la question en vertu de la Loi et j'ai rédigé le présent rapport.

FAITS

L​​es paragraphes qui suivent énoncent l'information recueillie par le Commissariat en ce qui concerne à la fois les faits allégués dans la divulgation et la préoccupation que j'ai soulevée.

Relation entre MM. Scott et Bibic

En réponse à ma préoccupation quant à la présence d'un conflit d'intérêts qui découle de la description faite par les médias de la relation entre MM. Scott et Bibic, décrite comme étant une relati​​on amicale, alors que M. Scott avait participé à la prise de la décision de télécom de mai 2021 sur la modification de l'ordonnance de télécom d'août 2019, qui engageait les intérêts personnels de Bell Canada, M. Scott a indiqué que ses propos cités dans l'article indiquaient que M. Bibic était une personne qu'il connaissait depuis de nombreuses années. Selon lui, c'est la personne ayant rédigé l'article qui a décrit les deux hommes comme étant des amis.

Dans sa d​​escription de sa relation avec M. Bibic, M. Scott a fait mention de l'interprétation du terme « ami » donnée par l'ancienne commissaire Mary Dawson dans le Rapport Watson. Il a indiqué qu'il ne portait aucune affection particulière à M. Bibic et qu'il n'entretenait aucun lien spécial ou d'amitié avec lui. Selon lui, les deux hommes n'ont aucun lien familial et n'ont pas les mêmes cercles sociaux personnels. Il a également mentionné qu'ils ne sont pas proches sur le plan personnel.

M. Scott a​​ indiqué que M. Bibic et lui travaillent dans les mêmes domaines depuis plus de 20 ans, principalement ceux de la politique en matière de concurrence et de la réglementation des communications. Bien qu'ils n'aient jamais travaillé ensemble, selon ce qu'a déclaré M. Scott, les deux hommes se sont croisés à quelques reprises dans l'exercice de leurs fonctions professionnelles.

M. Scott​​ a indiqué qu'avant sa nomination à la présidence, il n'avait d'interactions avec M. Bibic qu'à l'occasion de conférences ou d'événements organisés dans le secteur et que celles‑ci excluaient tout aspect personnel. M. Bibic et lui s'échangent des formules de politesse de base lorsqu'ils se croisent sur le plan professionnel.

M. Scot​t a indiqué que ses interactions avec M. Bibic sont extrêmement limitées depuis qu'il est à la présidence du CRTC. Mis à part les cas où M. Bibic a comparu au nom de Bell Canada lors d'audiences publiques du CRTC qu'il a présidées, M. Scott a précisé qu'il ne l'avait rencontré qu'à deux reprises au cours de son mandat. La première fois, c'était après sa nomination en septembre 2017, lorsque M. Bibic accompagnait le président et chef de la direction de BCE Inc. de l'époque, et la seconde fois, c'était dans un pub d'Ottawa en décembre 2019.​

Se​lon M. Scott, la rencontre de décembre 2019 a été organisée environ deux semaines avant qu'elle ne se tienne, par courtoisie, dans le but de féliciter M. Bibic de sa nomination à titre de président et chef de la direction de BCE Inc., comme cela avait été annoncé en juin 2019. M. Bibic se trouvait à Ottawa en vue de participer à un événement organisé par BCE Inc. auquel M. Scott n'a pas assisté.

M. Scott a indiqué que le caractère « social » de la rencontre, comme il est mentionné dans son agenda, avait pour but de montrer que la rencontre n'avait pas pour but de discuter de questions de fond relatives à la radiodiffusion ou aux télécommunications.

M. Scott a expliqué que les deux hommes ont discuté de l'annonce de la promotion de M. Bibic au poste de président et chef de la direction de BCE Inc., des défis généraux associés à un tel poste et du fait qu'il est relativement rare que des personnes ayant une formation dans le domaine juridique ou réglementaire accèdent à un tel poste.

M. Scott a également indiqué qu'au cours de la rencontre, M. Bibic a voulu discuter de l'utilisation des langues officielles et de l'importance qu'il entendait accorder à la langue française et à l'augmentation du nombre de médias francophones appartenant à Bell au Québec. Selon M. Scott, cet aspect de leur discussion a rendu nécessaire la déclaration de la rencontre en vertu de la Loi sur le lobbying. Il en a informé son bureau, qui a envoyé un courriel expliquant les exigences de déclaration de telles réunions en vertu de la législation sur le lobbying.

M. Scott a fait savoir que les deux hommes n'ont en aucun temps discuté de télécommunications ou de réglementation ou de tout dossier actif devant le CRTC. M. Scott a indiqué que ni M. Bibic ni lui n'avaient discuté de la demande que Bell Canada avait déposée le 13 décembre 2019 en vue d'obtenir une révision et une modification de l'ordonnance de télécom rendue par le CRTC en août 2019 au sujet des tarifs des services d'accès à haute vitesse de gros groupés.

M. Scott a déclaré qu'il avait payé sa propre boisson et que M. Bibic avait payé la sienne. Il a précisé qu'il n'y avait eu aucun échange de cadeaux, d'avantages ou de marques d'hospitalité.

M. Scott a indiqué qu'il arrive souvent que des réunions avec des intervenantes et intervenants aient lieu dans leurs bureaux ou dans les bureaux du CRTC. Un ou plusieurs membres du personnel du CRTC peuvent être présents pendant ces réunions, bien que ce ne soit pas toujours le cas. Les réunions peuvent aussi avoir lieu dans des lieux publics, comme un restaurant, à l'heure du dîner ou du souper. Cela peut se produire, a-t-il écrit, lors d'événements ou de conférences auxquels participent des intervenantes et intervenants de l'extérieur dans la région de la capitale nationale. Selon M. Scott, le personnel du CRTC et lui-même n'acceptent jamais de marques d'hospitalité. Il ne se souvenait que d'une seule réunion qui a eu lieu dans un pub, un bar ou un endroit similaire; c'était lorsqu'il a rencontré des personnes représentant le syndicat Unifor dans le salon d'un hôtel à Toronto en 2018.

Faits allégués concernant la tenue de réunions avec des intervenantes et intervenants

L​a personne ayant fait la divulgation a allégué qu'un acte répréhensible s'est produit lorsque M. Scott a rencontré seul à seul d'importants fournisseurs de services de télécommunications alors qu'ils avaient des dossiers ouverts et actifs devant le CRTC, notamment des demandes de révision et de modification de l'ordonnance de télécom d'août 2019 concernant les tarifs des services d'accès à haute vitesse de gros groupés. Il a fait référence au Code de valeurs et d'éthique du secteur public et aux pratiques du CRTC, notamment la valeur de l'intégrité et les comportements attendus pour éviter les conflits d'intérêts apparents.

En réponse à ces affirmations, M. Scott a déclaré qu'il n'avait contrevenu à aucune règle applicable. Il a expliqué qu'il arrive souvent que des membres du CRTC, y compris le président, rencontrent des représentants d'entités qui comparaissent régulièrement devant le CRTC et il a fait mention des dossiers tenus par la commissaire au lobbying pour appuyer ses dires.

M. Scott a indiqué que compte tenu de la nature du travail du CRTC, les intervenantes et intervenants principaux ont une multitude de dossiers ouverts devant le CRTC, sur une gamme de sujets, à tout moment, et a fait référence au site Web du CRTC pour montrer leur degré de participation. Il a également expliqué que l'objectif de ces réunions n'est pas de discuter de questions ou de dossiers précis sur lesquels se penche le CRTC à un moment donné, mais plutôt de permettre aux intervenantes et intervenants de déterminer les sujets d'importance générale pour le secteur ou pour un segment particulier du public canadien et de mieux comprendre les processus du CRTC.

ANALYSE

Relation entre MM. Scott et Bibic

La descri​ption faite par les médias de la relation entre MM. Scott et Bibic, décrite comme étant une relation amicale, m'a fait craindre que M. Scott n'ait été en conflit d'intérêts lorsqu'il a également été dit qu'il avait participé à la décision de télécom de mai 2021 modifiant l'ordonnance de télécom d'août 2019, qui engageait les intérêts personnels de Bell Canada.

Le paragraphe 6(1) de la Loi sur les conflits d'intérêts (la Loi) interdit aux titulaires de charge publique de prendre une décision ou de participer à la prise d'une décision qui les mettrait dans une situation de conflits d'intérêts. En voici le libellé :

6. (1) I​l est interdit à tout titulaire de charge publique de prendre une décision ou de participer à la prise d'une décision dans l'exercice de sa charge s'il sait ou devrait raisonnablement savoir que, en prenant cette décision, il pourrait se trouver en situation de conflit d'intérêts.


L'article 4 de la Loi énonce que les titulaires de charge publique se trouvent en situation de conflit d'intérêts, pour l'application de la présente Loi, lorsqu'elles et ils exercent un pouvoir officiel ou une fonction officielle qui leur fournit la possibilité de favoriser leurs intérêts personnels ou ceux de parents ou d'amis, ou de favoriser de façon irrégulière celui de toute autre personne.

Dans le Rapport Watson, ma prédécesseure, la commissaire Mary Dawson, a interprété le terme « ami » dans le contexte de la Loi comme étant « une personne avec laquelle on a des liens personnels depuis un certain temps au-delà de la simple association ». Dans le Rapport Morneau II[4​], j'ai élargi la portée du terme « ami » prévu dans la Loi pour qu'elle inclue les relations où les interactions personnelles et professionnelles s'entremêlent à un point tel qu'il devient difficile de tracer la ligne entre les deux.

Compte tenu de la description faite par M. Scott de sa relation avec M. Bibic, qui est demeurée exclusivement professionnelle malgré le fait que les deux hommes aient travaillé au sein du même secteur depuis plus de 20 ans, j'ai conclu que cette relation ne pouvait pas être considérée comme une relation amicale au sens de la Loi. Par conséquent, je n'avais plus aucune préoccupation que M. Scott ait pu favoriser les intérêts privés d'un ami ou favoriser indûment ceux de Bell Canada, dont le chef de la direction était un ami, lorsqu'il a participé à la prise de la décision de télécom de mai 2021.

Faits allégués concernant la tenue de réunions avec des intervenants

Selon la person​ne ayant fait la divulgation, en tenant des réunions ex parte seul à seul avec de grands fournisseurs de services de télécommunications alors que ceux-ci avaient des dossiers ouverts et actifs devant le CRTC, M. Scott a contrevenu au Code de valeurs et d'éthique du secteur public et aux pratiques du CRTC et n'a pas réussi à éviter un conflit d'intérêts apparent. Bien que le commissaire à l'intégrité du secteur public soit tenu, en vertu du paragraphe 24(2.1) de la Loi sur la protection d​es fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles, de saisir le Commissariat de toute question dont l'objet de la divulgation reçue relève de ma compétence en tant que commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique[5​], les conflits d'intérêts apparents ne sont pas visés par les interdictions de la Loi sur les conflits d'intérêts. Cette situation a été décrite en détail dans le Rapport Trudeau III[6​].

CONCLUSION

À la​​​ lumière de ce qui précède, je n'ai aucun motif de croire que M. Scott a contrevenu à la Loi, soit le critère à satisfaire pour que je procède à l'étude de la question. Par conséquent, je n'étudierai pas la question en vertu de l'article 45 de la Loi et je juge à présent que l'affaire est close.



1 - Tenue pour ou dans l'intérêt d'une seule partie ou d'une partie intéressée externe.

2 - Comme l'indiquent les articles de presse joints au renvoi, ces tarifs sont ceux que les grandes entreprises de télécommunications comme Bell Canada peuvent imposer aux petits fournisseurs de services Internet pour accéder à leurs réseaux. Des taux plus élevés sont considérés comme étant plus avantageux pour les grandes entreprises, tandis que des taux plus bas sont considérés comme étant moins avantageux.

3 - La décision de télécom de mai 2021 a accueilli les demandes de Bell Canada et d'autres grandes entreprises de télécommunication visant à réviser, à modifier ou à annuler l'ordonnance de télécom d'août 2019. Ce faisant, la décision de mai 2021 a principalement permis d'approuver de manière définitive les tarifs des services d'accès à haute vitesse de gros groupés qui étaient en vigueur avant la publication de l'ordonnance de télécom d'août 2019, ce qui a eu pour effet de revenir à des tarifs plus élevés.

4 - Rapport Mo​​rneau II, paragraphes 248-251.

5 - Je tiens à faire obse​​rver que la Cour d'appel fédérale est actuellement saisie de la question de savoir si la réunion ex parte de M. Scott avec M. Bibic dans un pub soulève une crainte raisonnable de partialité (A-299-21).

6 - Rapp​​ort Trudeau III, paragraphes 252-261.​


Date de modification :